Présentation
Imaginez un désert situé au nord de la Colombie. Partout autour de vous : du sable. Ça et là, quelques arbres, ce sont les trupillos. Jamais loin, l'Océan, qui s'étend à perte de vue. Les eaux cristallines du sud de la côte caraïbe ont laissé place à un océan sauvage dont les vagues, nombreuses, sont portées par un vent constant.
C'est dans ces conditions que nous avons rencontré Juan, un guide issu de la communauté Wayuu du petit village de Camarones, au sud de Riohacha, dans le désert de la Guajira. Juan est né et a toujours vécu ici, dans ce village de pêcheurs dont les maisons sont construites en branches d'arbres et terre séchée.
Camarones, c'est un village situé sur une lagune entourée de part et d'autre par l'Océan Atlantique.
À quelques mètres seulement s'étend le Sanctuaire de Faune et de Flore Los Flamincos (« les flamants roses »). C'est dans ce havre de paix que nous allons passer la matinée, sur la petite barque à voile de Juan.
Nous embarquons sur les eaux paisibles de la lagune, après avoir aidé Juan à hisser la voile. Nous attendons tranquillement que le vent veuille bien nous pousser pour avancer. Juan nous parle de sa passion pour les oiseaux : des espèces rares peuplent ce sanctuaire, dont les cormorans, les ibis rouges et, bien sûr, les flamants roses !
Juan nous explique qu'ici, tout le monde vit de la pêche : sa famille, ses amis et ses voisins.
Les hommes sortent à partir de 16h pour aller pêcher et nourrir leur famille. Nous comprenons pourquoi nous sommes la seule barque sur l'eau en cette matinée de fin septembre.
Nous avons de la chance de venir visiter le sanctuaire après 12 jours de pluie en continu : ce phénomène est très rare dans cette région désertique qui souffre terriblement du manque d'eau. En ce moment, l'eau, au plus profond de la réserve, ne dépasse pas les quatre-vingts centimètres.
Nous aidons Juan à pousser la barque, à l'aide de grands bâtons de bois, jusqu'à un premier groupe de flamants roses : il y en a des dizaines ! Ils se sont réfugiés tout au fond de la réserve et sont assez craintifs à l'approche du bateau. L'important est donc de rester le plus discret possible.
Quelques coups de bâtons au fond de l'eau plus loin, nous nous retrouvons face à un ibis rouge. Le sanctuaire étant entouré de mangroves, il est très facilement repérable de loin. Juan nous explique que cette espèce, très rare, est très recherchée par les scientifiques. Nous profitons du spectacle à bonne distance.
Après cette matinée sur l'eau, Juan tient à nous montrer les traditions de son village Wayuu.
Le rendez-vous est pris pour l'après-midi même. Il veut nous présenter quelques membres de sa communauté.
En attendant, rien de tel qu'un bon bain dans les eaux tourmentées et désertes de la Guajira !
Comme promis, nous retrouvons Juan dans l'après-midi. Il nous présente sa voisine, Maria Josefina.
Nous nous trouvons en plein centre de la communauté, à l'endroit où toutes et tous se retrouvent, sous un abri en bois.
Juan nous explique que la communauté est divisée en plusieurs « lieux de vie » : il nous montre la cuisine, la salle de bain commune, puis l'école au loin, et les maisons individuelles qui s'organisent autour des lieux communs.
Maria Josefina prend son ouvrage dans ses mains, son crochet de l'autre, et commence à crocheter tout en nous racontant son histoire. Sa mère n'a jamais eu la chance d'apprendre à parler espagnol, elle a eu quinze filles. La majorité des sœurs de Maria Josefina vont à l'école. Elle nous dit que cette génération est en train de faire bouger les choses.
Avant, il était courant qu'une fille se marie à 13 ans dans la communauté. La tradition veut toujours que, dès que ses premières menstruations arrivent, elle soit systématiquement placée dans une maison en « isolement » pour apprendre à crocheter, à cuisiner, etc.
« S'instruire mais ne jamais oublier d'où l'on vient »
Contrairement à d'autres personnes de la communauté, Maria Josefina souhaite devenir travailleuse sociale et exercer son métier au sein de sa communauté. Elle prend des cours à distance à cause de la pandémie ; son université se trouvant à Riohacha (à 1h de voiture).
Nous abordons le sujet des coutumes Wayuu. La langue Wayuu se perpétue de générations en générations. Il en va de même pour le crochet et la danse...
La danse est très importante dans la culture Wayuu.
Elle met en scène le vent, élément omniprésent à la Guajira, la beauté de la femme qui se maquille pour l'occasion ainsi que la force de l'homme qui suit les pas de la femme sans tomber. Les femmes Wayuu sont traditionnellement vêtues d'une longue robe rouge, elle symbolise la couleur du sang.
Un peu plus tard, nous prenons part à un repas typiquement Wayuu, avec de la Chicha (boisson de maïs fermenté), du bollo, une pâte de maïs ainsi que de la viande de chivo, une espèce locale de chèvre.
Nous ne partons pas sans remercier Juan et Maria Josefina une dernière fois...
… pour leur accueil si généreux et la passion qu'ils mettent dans la transmission de leurs valeurs, leur culture, leurs coutumes pour qu'elles nous soient accessibles.
Au fur et à mesure que nous quittons la région de Riohacha pour rejoindre la Media Guajira (« Guajira moyenne »), le paysage change.
Le sol devient plus aride encore, les routes se font très rares, les plantations de plus en plus asséchées, du sable à perte de vue... pas de doute, nous sommes bien dans le désert.
Nous traversons le petit village de San Rafael de Pajaro. Les habitants vivent dans son unique rue traversante. L'intérieur des petites maisons est délaissé pour les trottoirs du village, où tout le monde se retrouve pour discuter et partager un moment autour d'un plat de chivo frito, un plat local de viande de chèvre frite.
Ici, la route est récente : elle n'a que 2 ans. Avant, les usagers se voyaient obligés de passer par des chemins de sable, a peine tracés et impraticables en saison des pluies.
Nous passons en coup de vent à Uribia avant de rejoindre les salines de Manaure.
Plus d'un million de tonnes de sel est produit dans les salines de Manaure chaque année. Chaque saline appartient à une famille qui en prend bien soin. Auparavant, une partie du sel de Manaure était réservée à l'exportation, mais désormais, c'est 100% de la production qui est destinée au marché national.
Nous arrivons à Cabo de la Vela et Winy nous explique que beaucoup de familles vénézuéliennes se sont installées ici.
Elles vivent dans des casitas, de toutes petites maisons sommaires. Ces familles sont bien intégrées. La plupart du temps, elles ont rejoint des membres de leur famille déjà installés ici depuis longtemps. La culture Wayuu n'a pas de frontière : c'est ainsi que de nombreuses familles Wayuu vivent au Vénézuela.
Winy est guide depuis toute une vie. Il se rappelle de son passage ici en 1976 et nous explique qu'il n'y avait pas autant d'habitations avant : seulement 2 ou 3 maisons, pas plus. Les crises qui se sont succédé au Vénézuela et la construction d'une route jusqu'à Uribia ont fait se déplacer les populations. Elles viennent en Colombie pour y travailler et améliorer leurs conditions de vie.
Le village de Cabo de la Vela se situe en bord de mer. L'unique route traversante est en sable. Nous nous installons dans notre cabane en bois au bord de la plage.
Peu après, nous rejoignons la plage nommée Ojo de agua.
La piste monte à travers les branchages et les nombreux cacti. Nous partons faire une petite randonnée sur les collines surplombant l'océan. En contrebas, nous admirons la vue imprenable sur trois plages, creusées entre d'énormes rochers. Les falaises se jettent dans la mer et les vagues se déchaînent. Nous avons une impression du bout du monde.
C'est au faro (phare) que nous profiterons d'un coucher de soleil un peu nuageux, avec une vue à 360° sur la baie du Cabo de la Vela et sur la plage Ojo de agua.
Le soir, nous mangerons du pargo (le pagre, un poisson local) et nous dormirons dans notre cabane en bois typiquement Wayuu, dans le petit village de Cabo de la Vela.
Le lendemain matin, direction la magnifique Paya Arcoiris (plage arc-en-ciel) qui porte bien son nom.
Les vagues viennent percuter les rochers et, le soleil se reflétant dans les embruns, cela créé des arcs-en-ciel. La plage est recouverte de cairns, ici il n'y a pas de sable, mais uniquement des parois rocheuses qui se jettent dans la mer.
Nous rejoignons à pied le magnifique promontoire du Pilon de Azucar, situé à quelques pas de la plage et à seulement 50 mètres d'altitude. Nous dominons d'ailleurs la magnifique plage du même nom. En contrebas, quelques femmes Wayuu sont installées sous des cabanes afin de vendre leurs créations : sacs, porte-monnaies, tuniques...
Le vent souffle fort, nous comprenons bien pourquoi le Cabo de la Vela est un endroit idéal pour pratiquer le kite surf !
De Bogota à Medellin, de Carthagène des indes aux paysages de l'Amazonie, partez en voyage en Colombie à la découverte d'une autre Amérique du Sud.
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